5. De l'échelle laboratoire à l'échelle industrielle

Les expérimentations menées dans le cadre du projet ValBran ont été réalisées à l’échelle laboratoire (TRL 3-4). Les résultats obtenus démontrent que la technologie enzymatique permet de produire des biotensioactifs aux propriétés intéressantes à partir du son de blé .

Afin de démontrer la viabilité technico-économique des procédés, il est indispensable d’envisager des essais à l’échelle pilote . Une telle étape de changement d’échelle (up-scaling en anglais) est un prérequis pour valider ou non une technologie avant son passage au stade industriel (go/no go).

La mise en œuvre de tout nouveau processus dans l'industrie dépend de son retour sur investissement. Cela signifie qu'il est essentiel de prendre en considération les coûts de fabrication .

La première étape expérimentale pour tout procédé enzymatique est l'optimisation à l'échelle du laboratoire qui permet d'exprimer les rendements, les productivités et déterminer les limites du procédé. Ensuite vient l'étape pilote ; une étape transitoire clé. L'échelle pilote indique que le projet a dépassé les phases d'optimisation et de caractérisation, et que la mise à l'échelle et le déroulement des opérations pour la production du produit ciblé est examinée et optimisée. Une mise à l'échelle réussie doit permettre de maintenir la productivité et la qualité d'un processus. Un processus à grand volume doit être au moins aussi robuste qu'un processus à petit volume. Le fonctionnement à l'échelle pilote aide également à choisir la bonne plate-forme de processus au niveau de la recherche pour une future mise à l'échelle. En effet, partir d'une mauvaise plate-forme impactera le succès du passage à plus haute échelle. En outre, une mise à l'échelle sans ces critères peut conduire à un processus de fabrication inutilisable ou à faible rendement, entraînant des pertes financières, un surinvestissement de la capacité de production ou une incapacité à répondre aux besoins du marché.

Les facteurs importants devant être pris en compte sont23 :

  • les rapports hauteur/diamètre des réacteurs choisis ;
  • la géométrie de l'équipement : rapport entre le diamètre de l’agitateur et le diamètre de la cuve, la longueur, la largeur et l’angle des pales de l’agitateur ;
  • la dynamique des fluides : type d'agitation, nombre de turbines ;
  • les propriétés de transfert de chaleur et de masse ;
  • les étapes de traitement en aval.

L’analyse technico-économique doit être menée après avoir obtenu des éclaircissements sur les points mentionnés ci-dessus. L'évaluation technique du processus et les résultats obtenus lors d'un essai pilote donneront une image nettement plus proche de la réalité et pourront être utilisés pour établir une première base d'extensibilité à l'échelle industrielle24.

Interview Dr. Boris Estrine, Agro-industrie Recherches Développement

Photo de Boris Estrine Dr. Boris Estrine Agro-industrie Recherches Développement

Qu’est-ce qui détermine le succès d’une production industrielle ?

Il y a deux critères importants. Tout d’abord, l’existence des équipements industriels. Par exemple, chez ARD, nous disposons déjà de lignes de production en chimie verte et en fermentation. En effet, une montée en échelle sans devoir investir dans un nouvel équipement est un gain de temps indéniable. Ensuite, il y a l'évaluation des risques industriels liés à ce nouveau procédé, déjà pris en compte dans les phases amont du projet. Cette étape doit être à nouveau réalisée en vue de la montée en échelle d’une technologie tierce.

Une fois les deux critères vérifiés il faut réaliser l’étude traditionnelle de benchmarking et d’évaluation technico-économique avant la mise en production. Cette étape se réalise parfois sur une longue période, notamment si nous ne sommes pas sur un tensioactif « drop-in ».


23 Shaffer C, 2017

24 Woodley JM, 2017